Les journées se suivaient, mais ne se ressemblaient pas! Après un énième voyage, le dernier étant au Japon, je m’étais installée à l’appartement sagement presque trop fatiguée et étourdie par ce dernier décalage horaire. L’hiver ne m’aidait pas particulièrement et j’avais tendance à dormir un peu plus. C’était convenu avec MJ que nous allions nous voir quelques jours après mon retour, après 23 heures de sommeil consécutives. Je la retrouvais donc à proximité d’une pizzéria de Bridgeport. Dès que j’arrivais, elle était déjà présente et je l’enlaçais longuement. Je humais son parfum qui ne lui allait que trop bien. « Du bien, tu dis? » relançais-je de plus belle. Elle me faisait du bien, MJ. Pas toujours de la façon prévue, mais toujours intentionnellement. Enfin, c’était ce que je croyais.

La rouquine me disait que nous allions juste manger de la pizza et je pouffais de rire suite à son commentaire. « Attends attends, il y aura peut-être un serveur mignon que j’pourrai ramener! » Peut-être pour rendre Key jaloux un brin – ou qu’il me le pique une seconde après qu’il soit sorti de ma chambre. À la proposition de la rousse, je hochais la tête positivement en attrapant son bras également. Ma meilleure amie semblait réellement joyeuse et enjouée... Elle l’était plus que moi sans doute. On s’installait rapidement sur les banquettes près des cuisines. « Ça sent trop bon! » commentais-je une fois de plus. C’était inévitable, cet endroit sentait la bonne nourriture. Je retirais mon manteau puis mon foulard alors que MJ me questionnait sur les trucs que j’avais à lui raconter. « Heum... La vie est sérieusement un long fleuve tranquille. » dis-je simplement en haussant les épaules. « Hey! Tu savais que Key couchait avec mes conquêtes dès qu’ils quittent mes draps au petit matin? » demandais-je vivement en embarquant presque sur la table tant j'étais curieuse d'en connaître la réponse.

Le serveur apportait le menu et je le feuilletais lentement, après tout, il n’y avait pas de presse. « Tu vas célébrer Noël avec tes parents, cette année? » demandais-je à mon amie. Ses parents étaient suffisamment occupés et la réponse ne serait sans doute pas la même d’année en année. « Plus sérieusement, le vol vers le Japon m’a réellement sonnée, plus qu’à l’habitude. » Et Marie-Jane était clairement plus enjouée qu’à l’habitude, j’attendrais un peu avant de la cuisiner davantage. « Cocktail? » demandais-je donc.

Elle le savait! Elle le savait et elle ne me l’avait jamais dit! Ma bouche s’entrouvrait alors qu’elle commentait concernant ce qu’elle savait. Elle n’arrivait plus à pioncer tranquille selon elle et mon étonnement se transformait en un rire cristallin. « On le saiiiit, tu ne dors plus maintenant à cause de nous. » Dommage que ce n’était pas parce que nous étions ensemble me dis-je alors. Jamais ce n’était arrivé et ce rêve que je chérissais si souvent, j’avais espoir qu’il s’estompe un jour. Ce jour n’était pas encore arrivé.

La rouquine m’expliquait rapidement qu’elle resterait avec nous. Le bal de l’ambassade? Peut-être y aurait-il de beaux spécimens? « Habituellement, c’est pas là que tu rencontres de beaux mâles? » Je fronçais les sourcils alors qu’elle me parlait d’un riche héritier. « Oh et tu l’as rencontré? » lui demandais-je curieuse. Je lisais toujours les articles de ma meilleure amie, mais parfois je n’en comprenais pas le contenu caché ou sous-entendu. Néanmoins, elle se consacrerait corps et âmes pour le repas. « Key sera avec nous. » lui rappelais-je avec douceur et des yeux un peu plus tendres que ce qu’ils devraient être. MJ approuvait l’idée du cocktail et je hochais la tête positivement dans l’esprit de prendre un cocktail sans alcool. Je ne prenais presque plus d’alcool depuis les médicaments que ma mère me faisait ingérer. Mes reins le toléraient de moins en moins. « Sage, tu dis? » lui demandais-je avec un clin d’œil. Bon... Elle commandait deux énormes coupes et mes yeux s’arrondissaient. « Waouh, on y va mollo! » dis-je en riant doucement. Mon amie me disait que mes charmes avaient encore fait une victime. Sans comprendre, je l’observais et lorsque le barman revenait nous apporter nos cocktails, son regard en disait long et je le captivais le temps de quelques instants. « C’est bon, j’ai compris! » dis-je en riant. J’ouvrais le menu à mon tour et je le feuilletais une deuxième fois. « T’as une idée de ce que tu vas prendre? » Parce que de mon côté, je l’ignorais encore et toujours. Je repartais pour un troisième feuilletage sans trop savoir ce que je voulais.

Mon amie m’apparaissait particulièrement songeuse ce soir. « Est-ce que tout va bien, tu sembles préoccupée? » Que je lui demande avec douceur et des grands yeux de chiots implorant la confession. La rouquine repartait avec ses histoires de chasse aux croulants milliardaire. Je pouffais de rire. Il était vrai que parfois, Marie-Jane paraissait clairement avec des goûts plus luxueux et plus raffinés. « Trois collègues pour te piquer le sujet?! Waouh, mais ce type il a quoi de spécial? » Que je demande toute étonnée. Il était rare qu’il y aille des vols de sujets de ce que j’entendais. J’étais bien curieuse d’en apprendre davantage.

La rouquine aussi mourrait d’envie d’en entendre davantage... Elle me parlait de Machin? C’est qui machin, le serveur? Je me retourne vers lui et je fronce les sourcils... « Je ne vis pas à ses côtés sans rien faire... » Oh... et puis, je pigeais finalement. Elle parlait de Key. Je rougissais à vue d’œil. « Tu veux que je craque comment, sérieusement? J’veux dire il a sa vie et j’ai la mienne... » Sottises. Je rêvais de nos deux vies entremêlées.

En attendant, les cocktails s’amenaient et j’étais reconnaissante envers Marie-Jane de ne pas m’avoir commandé le pire des cocktails avec trop d’alcool à m’en faire renverser. Ça et puis, je ne tenais pas beaucoup l’alcool. J’étais plus souvent qu’autrement la conductrice désignée. Mon amie ne tardait pas à me dire ce qu’elle prenait et c’était si long et si luxueux que la mâchoire m’en décrochait presque. J’arquais un sourcil. « Chaque fois que tu sors un truc du genre, je me rappelle d’où tu viens. » Je pouffais de rire. Et moi, je mangeais le menu de la classe économique. Toujours aussi perdue, j’observais le menu et je soupirais finalement en le tendant vers MJ. « Choisis 2 plats pour moi et j’en choisirai un parmi ces deux là. » Dis-je finalement. Ça allait me simplifier la vie. « Mais saches que j’suis pas rendue au stade du dessert dans ma vie! » Elle et son tiramisu...

À sa question, je haussais les épaules vaguement. « Tu veux que je parle de quoi? » Admettre que j’ai des sentiments tordus pour mon meilleur ami? Ouais, plutôt mourir. « Key, ça reste Key, tu le sais bien! »

Marie-Jane était entreprenante, elle ramassait vivement les menus sans même que j’aille eu le temps de m’y attarder davantage. Elle me parlait d’un plat à la truffe et mes yeux s’arrondissaient. Elle avait certainement un luxe que je ne pouvais pas constamment me permettre. La demoiselle me suggérait une lasagne ou une pizza simple. Je pouffais de rire à voir son acte et je fis mine de réfléchir quelques instants. « Une lasagne avec un à côté de salade, ce serait parfait. » commentais-je alors plus certaine de mon choix. J’observais la rousse prendre une gorgée quasi-irresponsable de cocktail. Je me mordillais la lèvre en l’entendant.

« Non, je sais bien qu’il en a et ça m’embête pas, ce qui m’embête c’est qu’il se ramasse les miennes du moment qu’elles sortent de ma chambre! » Je soupirais doucement. « Et puis, il leur tire les vers du nez concernant comment ça s’est passé! C’est pas indiscret? » dis-je à ma colocataire, un peu indignée du comportement du blond. « S’il voulait coucher avec moi, il n’aurait qu’à me le dire... Enfin, pas que j’sois une fille facile ou que j’dirais oui, mais j’veux dire... Ça serait plus simple! » J’avais bafouillé des mots puisque j’étais mal à l’aise et que je sentais le rose me monter aux joues. Après, elle pouvait toujours répliquer que j’m’aventurais dans les draps de tout le monde assez facilement et que Key me l’avait offert à maintes reprises. Ses prochains mots me faisaient soupirer. « J’sais pas... J’préfère que ça reste dans les non-dits. C’est mon meilleur ami et j’supporterais pas de le perdre. » Admis-je tristement. « C’est comme de te perdre toi, c’est impensable! »

Rien n’avançait dans le dossier Mila/Key. Ou Kila. Il manquait que le « Te » et on y était dans tout ce bazar. Toute cette situation était particulière et surtout tordue. Lorsque je l’avais appris, moi la première, j’en étais toute retournée – et pas dans le bon sens. Est-ce nécessaire de la préciser? La jeune femme serrait ma main et je lui faisais un sourire. La rouquine poursuivait en me disant que c’était difficile d’être entre nous deux. Je fronçais les sourcils, je ne comprenais pas trop. « Comment ça être entre nous deux? J’veux dire, il n’y a pas de disputes ou de côté à prendre. » C’était vrai. Les faits étant ce qu’ils étaient, il n’y avait pas réellement de mauvais côtés. En dehors du fait qu’on s’envoyait mutuellement en l’air avec des étrangers et que MJ en payait les frais en ne dormant pas. Après, si elle avait un sommeil léger, ça la regardait hein!

La jeune femme approuvait donc le changement de sujet et je levais mon verre alors qu’elle disait au diable Key! Je pouffais de rire un peu ironiquement, j’en conviens. Le serveur accourait vers nous et je me retenais de lever les yeux au ciel. Mon amie poursuivait concernant mon décolleté et je baissais le regard vers celui-ci. « Han, mais non! Pour une fois qu’il n’est pas si pire que ça! » M’exclamais-je vivement avec une mine légèrement offusquée. Elle se détendait doucement lorsque je réalisais un truc... « Hey, j’y pense... On se voit moins à l’appartement, t’es souvent partie... Et t’as pas répondu à ma question plus tôt! Y’a quelqu’un dans ta vie, avoue! » Amusée, je l’étais.

Voir Marie-Jane rire me rassurait toujours un peu, non seulement mon sens de l’humour n’était pas déficient, mais son état à elle aussi était bien. La jeune femme se figeait et je faisais quelques signes de main devant elle. « Tu dors bien à l’appart? Mais tu y es plus vraiment... » Commentais-je, plus amusée que jamais. Je buvais également une gorgée de mon cocktail pour reprendre. « Habituellement, tu râles à quel point on fait du bruit Key et moi et là, plus rien. » Je voyais la rouquine tourner autour du pot avec un talent incroyable. « Vraiment chaud pour la saison? » Elle n’était pas fille d’ambassadeurs pour rien. Je levais les yeux au ciel. « Allez, crache le morceau. » Et voilà que j’ai eu raison d’elle. J’entendais un peut-être quelqu’un, j’ouvrais la bouche et je me mettais à rire doucement. Je lui donnais même une légère tape sur le bras. « Vilaine cachotière, allez dis-moi tout! » Je souriais à pleines dents. Je prenais mon cocktail pour en prendre une nouvelle gorgée. Le repas arrivait au même moment. Mon amie pensait définitivement s’en sauver... Mon regard la ravisa. « Beau, riche et de passage? Je comprends pourquoi tu cherches autant à le cacher! » Dis-je, d’un air un peu moqueur. « Dis m’en plus. » Lui dis-je en attrapant une bouchée de lasagne. « T’as raison, elle est vraiment délicieuse! » Beau, riche et de passage... Waouh, elle avait trouvé le jackpot maintenant que j’y pensais. C’était très pratique tout ça... Avait-il quelques amis dans le coin?

 Je continuais de manger ma lasagne avec lenteur, c’était moi tout craché. Elle me racontait qu’ils avaient dormi ensemble, à mon regard insistant, elle cru bon de préciser qu’ils avaient dormi. « Que dormi, hein? » Je fronçais les sourcils. « J’veux dire... T’es certaine qu’il est pas gay, le type? » Que j’demande de plus belle, parce que mon amie a pas l’habitude de laisser les hommes insensibles. Je continue de manger en l’écoutant et en l’observant. Elle poursuit et plus je l’écoute, plus mes yeux s’arrondissent. « C’est certain qu’il est gay ou marié. » commentais-je en haussant les épaules. « Mais, j’pense que c’est quelqu’un de bien à voir comment tu en baves devant lui. » Elle ferme les yeux et je lui envoie un regard compatissant qu’elle ne peut pas voir. « C’est particulier, je l’imagine. » Ajoutais-je doucement. Je n’avais pas beaucoup d’expérience en amour, encore là je ne devais pas avoir rencontré d’homme/prince incroyable qui me traitait comme une princesse. Si Key me proposait un muffin anglais, c’était déjà bien ça de gagner... « Et le problème, il est où? » C’était demandé avec tant de douceur et d’amour, j’avais peur que mon amie le prenne négativement. Il la rendait dingue, visiblement l’inverse pouvait être aussi vrai... Elle me parlait de ses yeux bleus et je riais doucement. « Il doit vraiment te plaire parce que même mes yeux à moi ont jamais eu ces compliments! » Je continue de manger. « Et tu penses faire quoi exactement? » La question se posait.